Les Saints, le groupe australien... Quelle histoire... J’écoute ce groupe depuis mon adolescence, quand mon frérot me fit découvrir ce deuxième album "Eternally yours" avec entre autre ce titre "No, your product" (Un hymne). Je ne m’en suis plus jamais remis : énergie, mélodie, chant, textes, attitudes, le summum du Punk... 3 premiers albums magistraux, légendaires et fondateurs avec plus particulièrement un "Prehistoric sounds" lorgnant vers la Soul. Mais tout ça a été bien largement traité par divers rock-critics et il est nul besoin de revenir sur la question. Non juste dire que j’ai entretenu pour ce groupe une passion infinie et qu’il m’a marqué à jamais... J’ai progressivement acquis l’ensemble de la discographie des Saints, au fur et à mesure des années passées. D’abord j’avais copié sur cassette "Eternally yours", customisant le boitier avec un visuel du film de Moretti "Palombella rossa", et je l’écoutais sans relâche, dans ma chambre ou sur le chemin du lycée, dans le bus, avec mon petit walkman au bouton stop rose. Puis je mettais fait offrir
"(I’m) Stranded" et "Prehistoric sounds" en vinyl, puis bien d’autres, période New Rose et sans Kuepper (ma copine de l’époque était sympa). Je me procurai des albums plus tardifs, petit à petit, au fil du temps comme "All fool days" ou "Prodigal song" et des albums solo de Bailey.
En 2006 j’appris par hasard, que les Saints se produisaient au Ramier, une salle & boite de nuit toulousaine sur l’île du même nom, au milieu de la Garonne, pas très loin du Stadium (l’antre du TFC). Bien sûr, il ne s’agissait pas des Saints dans leur line-up original. Le groupe dans sa composition originale n’existe plus depuis "Prehistoric Sounds". Ed Kuepper s’est fait la malle depuis longtemps, Ivor Hay, le batteur un peu plus tardivement (dernière apparition sur "Monkey puzzle" aux claviers). Chris Bailey reste le dernier survivant du groupe, officiant sous le nom des Saints avec différents musiciens. Tandis que Kuepper avait monté les Aints (par provocation et rancœurs peut être, reprochant à Bailey de s’accaparer un nom alors que le groupe dans sa composition initiale n’existe plus). Les deux artistes se sont peu à peu enlisés dans un conflit sans fin et plein d’amertume, s’octroyant le droit, chacun, de monopoliser la discographie du groupe et son histoire.
En 2006, il s’agissait des Saints version projet de Chris Bailey, accompagné par de jeunes musiciens. Mais ça restait les Saints, tout de même et une occasion ou jamais de les voir…
Quelques mois avant cette date à Toulouse, j’étais rentré en contact avec Chris Bailey. J’avais réussi à trouver son mail. Je crois qu’il résidait en Hollande, à l’époque. Je lui avais exprimé le souhait de réaliser un Tribute sur Arbouse recordings. Un Tribute basé principalement sur les fameux trois premiers albums. Il avait trouvé l’idée intéressante. Il m’avait donné son accord et semblait ravi par un tel projet. Bailey m’avait aussi suggèré de contacter Kuepper et de voir le problème juridique avec EMI, car ces derniers bloquaient tout au sujet des droits pour les 3 premiers albums. L’affaire me semblait plus complexe que prévu. Autant convaincre Kuepper me paraissait jouable, mais alors me dépatouiller avec EMI de ces histoires de droits d’exploitation des morceaux (le groupe lui-même étant en procédure depuis longtemps avec leur maison de disque initiale) me semblait délicat, voir infaisable. J’avais tout de même commencé à soumettre le projet à différents musiciens, et je dois dire que les retours étaient très positifs. J’avais contacté entre autre Adam Forkner (Yume Bitsu, [[[[VVRSSNN]]]], White Rainbow…), Les Thermals aussi, Nad Navillus... Tous étaient enthousiastes et me donnaient leur accord, quant à leur participation, certains même, me donnaient déjà le titre qu’ils souhaitaient reprendre.
Motivé par ces échanges, j’entrepris de rencontrer Bailey "en vrai" et de profiter de l’occasion de sa venue à Toulouse. Je pris contact avec le tourneur, lui expliquant le projet et je convenais avec lui qu’il me permette de rencontrer Chris. L’idée était de parler du tribute, de son avancée, et éventuellement d’autres choses.
J’en étais tout remué. Le jours j arriva. C’était en novembre de mémoire.
A cette époque j’étais en formation sur Toulouse, j’y étais tous les quatre matins, enfin au moins une semaine par mois. La date tombait en plein sur la semaine où j’y étais. Je descendais en train et de là j’opérais avec les transports en commun. C’était d’ailleurs une période bénite, où j’avais l’impression de reprendre une vie d’étudiant (c’est ce que je faisais en toute objectivité). A ce moment-là, je crois que je dormais à la maison des compagnons de Toulouse (dans le dortoir). J’avais trouvé ce plan d’hébergement (peu couteux, avec une restauration collective), qui s’est avéré au final catastrophique.
Le soir venu, je me rendais à pied de mon hébergement jusqu’à cette salle du Ramier. Un des rares concerts auquel j’ai assisté, seul… Une expérience étrange. J’avais pris mon petit sac à dos, et j’avais déambulé dans la ville, dans la nuit, sous la pluie. Le concert était organisé par une association toulousaine qui se dénommait "Première Pression", qui devenait incontournable à cette époque, programmant à tour de bras, de gros événements, pas toujours selon mon sentiment, de bonnes factures (je ne sais pas si ça existe encore). Je dus me taper les lives d’avant, celui des odieux The Lords of Altamont et celui encore plus pénible de The Lost Communists (groupe garage de Limoges). Une épreuve. Le son, l’attitude, les chansons, j’en saignais des oreilles, Voir un concert seul c’est pas terrible, mais voir en plus des trucs peu passionnants, ça devenait épuisant… Mais enfin, après un bon moment et quelques verres, mon attente fut récompensée par l’arrivée de Chris Bailey et de ses jeunes acolytes.
J’étais aux anges. Le set était nerveux, pas toujours juste, mais énergique. Bailey enchaina les standards du groupe, pour mon plus grand bonheur, et je m’aperçus bien vite que finalement les gens étaient venus voir massivement Lords of Altamont, et que les Saints ne leur parlaient absolument pas.
La sincérité était là, le groupe semblait être uni. Ils jouaient vite, peut-être trop vite. Le son de guitare était un peu approximatif (difficile de faire mieux que Kuepper), le chant de Bailey aussi (qui s’époumonait tout de même). On était bien loin sans doute des sets qu’ils devaient produire en 77, à Londres, en compagnie des Talking Heads ou des Ramones. Mais j’étais aux anges. Je me contentais de cette "version" édulcorée, et je fixais le groupe et son leader, en me disant, que je vivais sans doute un moment privilégié.
Après le live je me faufilais dans les loges avec l’aval du tourneur (comme prévu), qui m’offrit au passage un tee-shirt (et ça c’est une marque de courtoisie). Mon cœur s’emballait. Après un petit passage dans une zone toute noire, je me retrouvais nez à nez avec Bailey et ses musiciens, qui squattaient une petite pièce sous des néons... Ils rigolaient et picolaient sans retenue. Bailey lui, buvait du Chardonnay. Au goulot… Il me paraissait bien fatigué et sérieusement imbibé. La rencontre dura une heure environ, et ne fût pas à la hauteur de mes espérances. Bailey ne semblait pas vraiment préoccupé par le projet du Tribute et je n’osais pas vraiment insister sur le sujet. Nous avons bavardé de banalités, malgré mon anglais pitoyable, et leurs accents australiens à couper au couteau (ou néerlandais ?). Je me résignais à ce type d'échanges, ce n’était finalement déjà pas si mal. Ils semblaient uniquement intéressés par la prestation qu’ils venaient de délivrer. Je me contentais de les écouter, en faisant de rares interventions. Au bout d’un moment je pris la décision de m’éclipser, en les saluant bien bas et je repris mon chemin de retour, sous la pluie, dans la nuit. Il était déjà bien tard, je marchais rapidement, en repensant à ce live, à cette rencontre fugace, bien loin de ce que j’avais espéré. Mais avec cette sensation toujours aussi prégnante, d’avoir vécu un truc de dingue…
Le Tribute ne sortira finalement jamais (mais l’idée est tjrs là...).
Comments