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  • kocat

New Order "Brotherhood" (1986, Factory)


En 1987, en septembre, j'attaque le lycée, en seconde générale, dans le lycée vierzonnais Edouard Vaillant. Jusque là rien de très original, bien qu'être au lycée à Vierzon était en soi un petit exploit (je plaisante bien sûr). Un an plus tôt, presque jour pour jour, au moment où j'intégrais une classe de presque 40 "péluts", sortait un album intitulé "Brotherhood", signé New Order. Mais ça je ne le savais pas. Mes lectures aléatoires de Best ne m'avait pas permis d'identifier une telle information, et quand bien même, je ne suis pas certain que je l'eus fait, tant ma culture musicale était encore balbutiante (soyons humble, malgré Gun Club, les Stranglers, Polyrock, Marquis de Sade, The Cure, Talking Heads, DD, Depeche Mode...). Mais de tout ça j'en ai régulièrement évoqué la teneur. J'ai eu l'occasion aussi de parler de mes différents "passeurs", et notamment de David G qui était justement dans ma classe. David était de Chaillot je crois, un quartier de Vierzon (où y avait un club de foot au maillot orange, je jouais d'ailleurs contre eux et ils me faisaient penser au Stade Lavallois, club que j'adulais). Nous nous étions rapprochés, en étude (après la cantine). Nous nous avions trouvé un intérêt commun pour la musique et pour les tranches de franches rigolades. David avait les cheveux raides, en bataille. Il avait une petite moustache d'adolescent, qui lui donnait un air sud américain et était particulièrement jovial. Un bon gars en somme. Lors du premier trimestre nous avions fait pas mal connaissance, et nous avions pu échanger sur nos goûts respectifs. David me parlait souvent de groupes inconnus. C'était incroyable. Je ne sais pas d'où il détenait tout ce savoir. Et il possédait un nombre incalculable de cassettes enregistrées. C'était dingue. Nous faisions des échanges. Nous nous prêtions nos cassettes, et nous nous faisions découvrir des groupes et des albums. Je dois bien avouer que c'était plutôt David qui me pourvoyait en nouveauté. Son esthétique était clairement New Wave, Post-Punk même, pour mon plus grand plaisir. Je lui avais fait une copie de "Rue de Siam" de Marquis de Sade et de "83" de Marc Seberg. Je lui avais filé "Fire of Love" de Gun Club. J'avais essayé de le sensibiliser aux Smithereens et leur premier album. Mais il était moins sensible à cette Pop Rock pour laquelle j'avais un affection irraisonnable. Quant à lui, impossible de répertorier tous les disques et groupes auxquels il m'a initié, de PIL en passant par Clan of Xymox, de Norma Loy en passant par Trisomie 21, des Psychedelic Furs en passant par That Petrol Emotion, la liste est vertigineuse. Parmi les révélations, il y en a une qui reste majeure. Je connaissais de réputation Joy Division, mais je n'avais pas encore eu l'occasion d'écouter un album. Je savais que c'était un groupe culte, et mon copain de 3ème, Lionel, keupon exilé de Lyon, m'en avait souvent parlé. David me proposa un live pirate du groupe, celui des "Bains Douches" (qui ne l'est plus d'ailleurs). C'est la déflagration... Je ne m'en remettrai jamais plus. Je découvre la basse (je viens de monter un groupe à ce poste, vu précédemment), et elle tabasse...Ces titres me mettent en transe, avec cette voix sorti d'outre-tombe. David me suggère alors d'écouter le groupe qui a fait suite à Joy Division et la disparition de Curtis. Il m'évoque New Order. Il m'explique que justement ils viennent de sortir un album en septembre dernier : "Brotherhood" et qu'il le possède en cassette enregistrée. La bonne aubaine... Mais comment David arrivait-il à trouver ces skeuds? Chez qui s'approvisionnait-il ? Il ne me livrera jamais son secret...

J'ai écouté pour la première fois ce disque dans mon walkman, un soir, dans mon bus de retour. C'était mon lieu privilégié pour mes séances d'écoutes. Je regardais défiler les paysages (assez répétitifs, en Sologne), la tête appuyée sur la vitre. Le trajet durait le temps d'une cassette de 60 minutes. Je me souviendrai pour la vie des premières notes de cet album dans mes oreilles juvéniles. Je m'attendais à un truc, au final assez proche de mon live de Joy D (même si depuis 79 il s'en est passé des choses, mais ça je ne le mesurais pas), et puis brusquement, de nouveaux horizons... La basse (de Hook) était toujours aussi énorme et intense. Mais les éléments électroniques contenus sur cet opus me déboussolaient quelque peu. J'écoutais bien Depeche Mode ou DD, mais je m'attendais pas à ça. Pourtant à l'issue de son écoute, une fois arrivé chez moi, il y avait quelque chose qui s'était opéré, cela avait un goût de "reviens-y". Je mis la cassette dans ma chaine, dans le lecteur de cassette. Avec l'amplification, l'effet fût prodigieux, dès les premières notes de "Paradise", au point de devenir addictif. La voix de Sumner exerça sur moi un charme irrationnel. Un chant assez discret, tout en retenue, mais terriblement mélodique. La face A était plus musclée, avec des guitares prononcées et une basse tout en avant, redoutable comme sur "Broken promise". La face B était plus électronique, plus Pop avec "Bizarre love triangle", comme tube, en exergue. L'ensemble, malgré cette dichotomie apparente et évidente, n'en demeure pas moins cohérent et surtout si efficace. Les compositions sont tout simplement mélodiques, et entêtantes, avec un côté dansant déboussolant. Un disque joyeux, malgré tout, faussement mélancolique. "Brotherhood" m'ouvrira indéniablement des portes, jusqu'alors insoupçonnées. Je fis état de mon contentement à David, qui aussitôt me fournissait les précédents albums. Je devenais dingue. New Order, pendant un moment, ne bougea plus de ma chaîne. Bien des années plus tard, je me procurerais tous ces disques en vinyl, petit à petit. Et c'est "Brotherhood" que j'acquis en premier, comme par hasard, remerciant pour l'éternité mon ami de m'avoir amené jusque là. Cet album avec son numéro de série (dont parait-il, il existe des versions collectors, sorties à Noël 86, avec du zinc et du titane) occupe une place singulière dans ma discographie, et je l'écoute encore, si souvent, avec la même intensité et ferveur que la première fois, à mes 16 ans.



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